Le 21 mars 2012 à 09:13
Pony Pony run run, « brett » me voilà médaillé! Challenge Millésimes Bio (épisode 2/2)

Je vais être très sévère dans les lignes suivantes, car proposer des vins touchés par les « brett » et récompensés d’or ne rend pas service aux consommateurs finaux. Faire croire qu’ils sont d’excellents vins au goût de terroir est une mauvaise éducation qu’il faut changer.
Retour sur cette journée de Challenge Millésime Bio.
A la fin du concours, on propose de sélectionner des Mentions Spéciales, la distinction suprême parmi les 55 médailles d'or.
Chanceux d'être dans les parages, je me suis glissé à la table des vins rouges français.
Une vingtaine de médailles d'or y figuraient et l'objectif était de sortir si possible un ou plusieurs apollons.
A mon grand étonnement, sur ce concours national, il n'y avait quasiment que des vins du sud (Languedoc, Roussillon, Rhône) décorés d’or.
Peut-être le profil des dégustateurs en amont (trop habitués aux vins du sud) ?
Bref, passons. Conseil tout de même, si vous êtes vignerons en zone septentrionale, sachez que vos vins auront du mal à passer ce jour-là le barrage des palais de certains dégustateurs.
Début des hostilités, avec les vins médaillés d'or.
Croyez-moi ou pas, ce fût un festival de concours de chevaux de course, ou devrais-je dire le festival de phénols volatils (4-éthylphénol + 4-éthylgaïacol). Pour rappel, les levures brettanomyces provoquent une altération redoutée dans les vins qui se traduit par ces odeurs.

Bref, à ce moment-là, j’étais dans l’écurie d'Augias, au moins la moitié des vins étaient bourrés de « Brett » ! N’étant pas Hercule, j’ai eu du mal à terminer le travail (de sélection).
Comment peut-on décorer d'or un vin défectueux ?
Pourquoi tant de dégustateurs ne savent pas reconnaître les « brett » ?
Pourtant tous connaissent le mot si populaire et tous bannissent ces maudites levures – source de déviance aromatique dans les vins.
Encore une fois, j’étais frustré de voir combien ces odeurs infâmes de poney, de gouache, de selle de cheval arrivent à passer les barrages des goûteurs de cru.
A-t-on oublié que la stabilité microbiologique était essentielle dans un vin ?
Aujourd'hui, tous les techniciens savent que la filtration avec une membrane de porosité inférieure à 1 µm est nécessaire pour endiguer les risques de multiplication de levures Brettanomyces.
A ma table, les jurés étaient étonnés eux aussi. Tant de médailles d’or aux odeurs de poney ! Heureusement, dans le lot, figuraient quelques très belles bouteilles.
C’est vraiment un cri du cœur à tous ceux qui ne savent pas identifier ces odeurs abjectes.
Essayez de les mémoriser afin d’écarter des vins poisseux lors de concours. Je ne prétends pas être un virtuose dégustateur (bien au contraire) mais je crois bon de savoir détecter les principaux défauts avant de se focaliser sur l’analyse de la qualité intrinsèque du vin. Il y a 10 ans je pensais moi aussi que les « brett » étaient le signe d’un goût de terroir prononcé et croyez-moi, j’aurais été un piètre juré à ce moment-là !
Les consommateurs « non experts » ont un fort degré d’incertitude face au produit « statufiant » qu’est le vin, car il positionne socialement. Le risque de se tromper dans son choix est grand avec le vin. De fait, les consommateurs minimisent ce risque en achetant un vin connu ou reconnu (voir la théorie de Richard Ladwein sur le comportement du consommateur : Catégories cognitives et jugement de typicalité).
Les médailles d’or sont un signe notable, il faut donc s’efforcer de bien les sélectionner.
Savoir détecter les principaux défauts du vin n’est pas dans les gènes malheureusement. J’invite tous ceux qui le souhaitent à s’inscrire à une formation technique sur le sujet (il en existe plusieurs).
En espérant que l’année prochaine, le haras ne soit pas couvert d’or…
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